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TROUVER DE L'EAU POTABLE est un problème préoccupant qui touche même l'Aquitaine, région pourtant bien arrosée, et tout particulièrement l'Entre-deux-Mers. Voici ce qu'en dit, en 2002, Marie-Thérèse Cérézuelle, Chargée de Mission " Eau " de la SEPANSO :
 
"Le XXI-ème siècle verra-t-il les guerres de l’eau ?

Les prévisions sont pessimistes à l’échelle mondiale. Les Pays du Moyen-Orient se volent "l’or bleu" au prix de barrages gigantesques. En Chine, le plus grand barrage du monde, celui des Trois-Gorges sur le Yang-Tsé, va noyer des centaines de kilomètres d’une vallée très fertile et déplacer des millions d’habitants, malgré une contestation bien vaine … Les exemples sont multiples de populations sacrifiées à l’intérêt dit général.

En Aquitaine, "pays des eaux", la pénurie existe-t-elle ? Les grands barrages hydroélectriques de l’après-guerre ont profondément transformé le réseau hydrographique des Pyrénées et du Massif Central au nom du dieu Energie. Puis ce furent les centrales nucléaires du Blayais et de Golfech qui avalent des énormes quantités d’eau et rejettent leurs produits radioactifs.

La finalité des barrages a changé avec le contexte de la politique agricole commune et le "tout maïs". De l’eau, toujours plus d’eau, pour produire de plus en plus et sécuriser lors des années sèches. Il faut retenir l’eau "qui se perd en hiver", donc la stocker. Des bassins de toutes tailles sont programmés sur un Plan Décennal de Ressources en Eau (PDRE) : 400 millions de m3, puis 600… au fur et à mesure de l’explosion des surfaces irriguées dans l’euphorie de la PAC. Certains projets grandioses ont été bloqués par les associations et les riverains. D’où la prolifération de milliers et de milliers de lacs dits collinaires, grâce à des subventions, pour pallier la déficience des ruisseaux pompés à mort (ou presque). Quel est donc le bilan des volumes prélevés ? Il est très difficile à évaluer car les redevances prélevées sont basées sur un forfait à l’hectare. Précisons que beaucoup de compteurs d’eau ne sont pas encore en place malgré le décret de 1997, sauf sur les axes réalimentés.

Sous le prétexte de "soutien d’étiage", de nouvelles réserves sont programmées qui arroseront aussi de nouveaux hectares. Des études appuient les fameux Plans de Gestion des Etiages (PGE) sur l’Adour, la Garonne, le Dropt, etc. Ce dernier, approuvé, entraînera de nouvelles réserves sur tous les petits ruisseaux du bassin versant et donc de nouvelles redevances qui tomberont… L’impact de cette multitude de barrages est grave. La Commission du Milieu Naturel Aquatique (CMNA) constate qu’à l’aval d’un lac de barrage il y a presque toujours déclassement du cours d’eau. Un rapport récent du CSP (Conseil Supérieur de la Pêche) conclut à une dégradation des rivières au plan national. Seulement 15 % seraient en bon état piscicole, même si l’on peut noter une amélioration pour certaines. Les causes sont multiples.

Malgré des financements considérables, la plupart des stations d’épuration ne sont pas aux normes européennes, même celles de Toulouse et de Bordeaux (rejets d’ammonium, phosphates, métaux lourds, toxiques, etc). Rivières et lacs trop bien "nourris" sont atteints d’eutrophisation et d’asphyxie (mortalité des poissons). Si, globalement, les industries ont réalisé des progrès dans la dépollution, la pollution agricole, chronique et insidieuse, fait sentir ses effets à plus au moins long terme, même si quelques mesures sont préconisées…

La problématique des eaux souterraines est encore plus grave, car moins visible. La pollution par les nitrates n’a été reconnue que dans les années 80, soit vingt ans après le début de l’usage intensif des engrais. Même si l’on stoppait tout apport, on en retrouverait encore dix ou vingt après dans les nappes, dit le COPREN (Comité d’Orientation pour la Réduction de la Pollution des Eaux par les Nitrates). En général, les nappes sont moins contaminées que les eaux de surface, en particulier par les pesticides. Mais "on ne trouve que ce que l’on cherche" et les analyses sont fort coûteuses. De plus les produits de dégradation peuvent être beaucoup plus dangereux que les molécules initiales. Sur les 900 matières actives dans le cocktail des pesticides, combien en recherche-t-on ? Surtout l’atrazine, la simazine, le diuron, et parfois quelques autres. Or, ces molécules sont très dangereuses à terme pour la santé. Les informations sont très lacunaires sur la qualité des eaux souterraines. Notons qu’il n’y a pas de site Internet en Aquitaine pour une banque de données et qu’il est très difficile de se procurer les analyses d’eaux brutes pour l’eau potable. Pourquoi cette rétention d’information ? Jusqu’à présent, en Aquitaine, on a privilégié les ressources profondes pour l’eau potable. Mais pendant des décennies, on a puisé sans vergogne dans ce capital pour tous les usages. Bientôt, la pénurie obligera-t-elle à boire l’eau des rivières, même si elle n’est pas "potabilisable" comme celle de l’Isle ?

Le SDAGE ( Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux) impose une hiérarchie des usages. On essaie maintenant de rattraper les erreurs du passé dues au laxisme des "responsables" qui ont couvert cette politique de gaspillage pendant quarante ans. Les coûts sont, et seront, de plus en plus élevés, tant sur le plan social, écologique, que patrimonial, pour la restauration des milieux et des ressources. Seule une politique volontariste peut imposer des limites et surtout des économies d’eau à tous les niveaux. Il est urgent d’agir, car l’eau est une ressource limitée et fragile.

... On ne peut plus parler de développement durable, mais d’équilibre durable pour la sauvegarde du capital eau dont nous sommes tous responsables."


NFORMATIONS COMPLEMENTAIRES
 
Selon un rapport de l'IFEN (Institut Français de l'Environnement) publié début février 2003 :
 
  • En France les pesticides, (fongicides, herbicides, insecticides) sont présents sur 90 % des points surveillés en rivière et sur 58 % des points en eaux souterraines.
  • En 2000, la France avec 103 000 tonnes de pesticides est le premier utilisateur européen et le troisième mondial. Les effets de ces produits sur la santé (cancers, baisse de fertilité masculine, troubles du système endocrinien) ont conduit l'Europe à demander le retrait du marché en 2003 de 320 substances utilisées dans la fabrication des pesticides.
  • La France va renforcer son diagnostic de qualité des eaux d'ici 2004, une directive européenne imposant de parvenir en 2015 à un "bon état écologique des eaux".
 
L'un des sujets développés dans l' émission SEPT à HUIT du dimanche 9 mars 2003 sur TF1 montrait un site de stockage de produits phytosanitaires à base d'arsenic, abandonnés depuis un certain nombre d'années, recouvert actuellement par un plan d'eau dans le Roussillon, et expliquait clairement que ces eaux par infiltration finissent par contaminer les eaux destinées à la consommation humaine.
 
Curieusement on dispose d'assez peu de données sur la consommation et la qualité de l'eau dans notre région.. Toutefois voici un sujet préoccupant qui éclaire bien la situation et que nous livrons à votre réflexion :
 

Le Puits de Naudinot à RIONS, dans notre Entre-Deux-Mers,
un exemple de ce qui nous arrivera de plus en plus souvent.

A Rions on a remis en service en avril 2003 pour la consommation humaine un captage peu profond (12 mètres environ) dont l'eau est régulièrement polluée par les pesticides. Solution proposée par l'Administration pour rester dans la norme : mélanger cette eau avec celle d'une autre provenance (captage profond donc le débit diminue considérablement). Jusqu'à quand cette mesure sera-t-elle efficace si on ne prend pas dès à présent des mesures pour empêcher les pollutions par des produits de ce type dont l'élimination est très lente ?

Lors de l'enquête publique (du 18/11/02 au 2/12/02) le commissaire enquêteur a refusé d'organiser une réunion publique sur le sujet puis il a déjà donné un avis favorable. Il a estimé impossible d'imposer des cultures "bio", donc sans aucun produit à base de molécules de synthèse, dans les périmètres de sécurité autour de ce captage. Il a tout de même proposé une mesure de protection : renforcer le grillage autour du périmètre immédiat (d'un rayon de quelques mètres) et le fermer à clé. Nous vous laissons le soin d'apprécier la pertinence de cette protection par rapport à l'enjeu.

ATTENTION ! C'est le premier cas dont nous avons connaissance localement, mais il risque bien d'inaugurer une longue série si les pratiques agricoles et industrielles ainsi que la gestion des eaux ne sont pas revues rapidement et sérieusement et si la réglementation n'est pas strictement appliquée par tous. Si l'eau "buvable" qu'on nous fournit actuellement est puisée dans les nappes profondes de l'éocène (qu'il va falloir économiser car elles ne se renouvellent quasiment pas) ce n'est pas en raison d'un manque réel d'eaux de surface mais parce que ces dernières sont pour la plupart trop polluées pour être utilisables.

IL FAUT QUE TOUS EN PRENNENT BIEN CONSCIENCE DES A PRESENT.

 
 
ECONOMISEZ L'EAU !
C'est le discours officiel près de Créon, comme dans toute la Gironde : l'eau devient rare ; le débit de la nappe profonde qui nous alimente se réduit ; il faut la ménager...

ILLUSTRATION PAR L'EXEMPLE

Lors de la première séance du comité de suivi (février 2002) de la distillerie le maire de Créon s'était plaint de la trop grande consommation d'eau à St Genès de Lombaud. Il s'agissait de plusieurs milliers de m3 d'excédent . La quantité moyenne par compteur était bien plus importante qu'à Créon. Il a donc demandé à la distillerie de lui fournir des justicficatifs de sa consommation. Peu après il nous a annoncé son intention de limiter la quantité d'eau fournie au Syndicat des eaux de Saint Genès-Madirac si la distillerie ne s'engageait pas à réduire ses prélèvements sur le réseau. C'est ce qui arriva quelque temps après.

QUI DOIT ECONOMISER ?

Dans son bulletin d'information communal d'octobre 2002, le maire de Saint-Genès (ayant des intérêts à la distillerie et président du Syndicat précité) invitait ses administrés à économiser l'eau du robinet car "M. le Maire de CREON, par lettre recommandée, a interrompu la convention de fourniture de l'eau au Syndicat de l'Eau deux ans avant la fin du contrat. La nouvelle convention sera très différente de l'ancienne .....et le volume devra passer d'environ 43000 m3 à 35000 m3/an".

C'est pourquoi à l'occasion de la deuxième réunion du comité de suivi (juin 2003) nous avons posé la question suivante :

-Nous n'avons toujours pas réussi à comprendre les vraies raisons des surconsommations d'eau du réseau au cours des années passées à Saint Genès de Lombaud. Le problème est-il définitivement réglé et la distillerie s'en tient-elle désormais au prélèvement autorisé par l'arrêté du 18 octobre 2001 soit 1 m3 par jour ?

Voici la réponse :

-...à la demande de l'exploitant, et après accord avec la société SOGEDO, gestionnaire du réseau d'adduction d'eau potable, l'inspection a proposé de modifier la répartition des prélèvements autorisés :

- réseau AEP : 3 m3/jour
- Soye : 297 m3/jour (antérieurement 299 m3 par jour)

Alors la distillerie a pu prélever 2 m3/jour supplémentaires sur le réseau qu'elle ne devait plus prélever dans la Soye.! Ceci a porté sa consommation "d'eau du robinet" à 1100 m3 par an (l'équivalent de dix familles environ), une eau précieuse provenant de la nappe profonde de l'Eocène qu'il convient d'économiser à tout prix, si l'on en croit le discours officiel à destination du public.

LA MORALE DE CETTE HISTOIRE ?
"Faites ce que je dis ; mais ne faites surtout pas ce que je fais !"

EPILOGUE :
Le Tribunal Administratif ayant annulé tous les arrêtés relatifs aux activités de la distillerie postérieurs à 1975 et 1985, le préfet a délivré un arrêté d'exploitation provisoire revenant à un prélèvement de 1 m3/jour sur le réseau en attendant qu'une nouvelle autorisation d'exploitation soit accordée à la suite d'un nouveau dépôt de dossier, avant le 23 octobre 2013, une étude par les services de l'Inspection des installations classées et une nouvelle enquête publique. Affaire à suivre ...

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Pour en savoir plus :

un livre :
Le dossier de l'eau, Pénurie, Pollution, Corruption, de Marc Laimé, collect. l'Epreuve des faits, éd. SEUIL
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Dernière révision : 21 octobre 2013.