UN FILON INEPUISABLE : LES ORDURES A chaque époque ses filons et ses monstres insatiables auxquels on sacrifie : après l'or jaune, métal éclatant, longtemps réservé aux dieux et aux rois et qui pendant des siècles a servi le commerce, nous sommes passés à "l'or noir", brûlé sur l'autel de l'industrie et de la pétrochimie, puis à "l'or bleu", cette eau si précieuse qui se renchérit au fur et à mesure que sa qualité diminue et commence à se vendre à prix d'or, faisant la fortune de grandes compagnies ; enfin on a découvert un nouvel eldorado : les gisements d'OR-dures dédiés à la prospérité des lobbies de l'incinération et de l'enfouissement.
Industriels et financiers ont rapidement flairé tout le bénéfice qu'on pouvait retirer de la "valorisation" de nos déchets ! Comme pour la gestion de l'eau potable et des eaux usées, ils ont réussi à se présenter comme indispensables et à persuader les élus qu'ils détenaient LA solution miracle et incontournable pour "éliminer" les déchets : l'incinération, rebaptisée pour l'occasion valorisation énergétique ! Chaque médaille ayant son revers, à l'usage on redécouvre un grand principe : rien ne se perd, tout se transforme. Rien n'est jamais éliminé ; 70 % de nos ordures se retrouvent dans l'atmosphère sous la forme de gaz à l'innocuité pour le moins contestable (gaz à effet de serre, dioxines, COV et autres HAP...) et les 30 % restants, sous forme de mâchefers -déchets ultimes-, sont stockés dans des C.E.T. (centres d'enfouissements techniques - terme "valorisant" pour désigner les décharges qui avaient fini par avoir mauvaise réputation) dans lesquels on ne tardera pas à les oublier avec les risques inhérents de pollution des sols et des nappes phréatiques. Nombreux sont les élus qui se sont laissés charmer par le chant de ces sirènes, par ignorance, par intérêt ou tout simplement par facilité, oubliant que leur fonction primordiale est de veiller au bien public "en bon père de famille", comme on dit dans certains contrats lorsqu'on veut insister sur le respect que l'on doit au bien d'autrui, les deniers de l'usager ou du contribuable en l'occurrence. Il est bon de rappeler ici que lorsque des communes reprennent en main elle-mêmes le service de l'eau, par exemple, la facture de l'usager baisse invariablement. Le service de l'enlèvement des ordures a lui aussi besoin d'être revu.
Actuellement, le SEMOCTOM est en train de soulever une vague d'indignation parmi certaines populations de l'Entre-deux-Mers scandalisées en raison de l'extraordinaire accroissement du prix de l'enlèvement des ordures ménagères. Le passage de la "redevance" (REOM) à la "taxe" pour l'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) semble avoir été l'occasion de faire passer incognito une augmentation de tarif.
Les montants atteints par la TEOM sont d'autant plus inadmissibles qu'il est tout à fait possible de gérer le problème de façon non seulement plus économique mais aussi plus écologique :
Le 21 février 2004, dans le cadre du Forum d'Halte Incin' à Boulazac en Dordogne (qui a eu
un énorme succès avec 2000 visiteurs environ) M. Dany
Dietmann a donné une conférence sur cette expérience
intéressante accompagnée d'un diaporama très
pédagogique sur le cycle des déchets dans la nature et
sur les moyens de les réduire. M. Dietmann a bien insisté sur le fait que le résultat actuel ne s'est pas obtenu en un jour et que l'éducation des populations, en passant par celle des enfants, est tout à fait primordiale. En ce qui concerne les détails pratiques, il a indiqué que pour le syndicat de ramassage des ordures, le prix de revient de la collecte sélective au porte-à-porte est plus avantageux que celui de la collecte de déchets non triés. En aucun cas il ne revient plus cher. Les habitants qui sont maintenant bien habitués à ce système ne veulent plus en changer. Les poubelles sont munies d'une puce électronique et à chaque ramassage, la pesée se fait à plein puis à vide, la différence étant comptabilisée par l'ordinateur de bord du camion de ramassage. Quant au prix facturé, après quelques tâtonnements et ajustements nécessaires au cours des premières années, le syndicat est arrivé à l'établir d'une manière juste et équitable qui satisfait tout le monde : un forfait annuel de 19,82 par foyer avec un supplément de 0,29 par kg. Pour une famille de quatre personnes, on arrive à un total annuel de 120 , ce qui est très raisonnable. De surcroît, le système mis en place dans cette communauté de communes alsacienne a l'avantage de respecter le citoyen en le responsabilisant par une participation active. Il est d'ailleurs intéressant de rappeler qu'à l'origine le projet avait été soumis à "référendum". Le gain d'environ 100.000 tonnes par an réalisé sur les déchets ménagers dans la région a permis de faire l'économie d'un incinérateur et de réduire considérablement le recours au C.E.T. Qui dit mieux ? M. Dietmann a bien mérité le titre de Chevalier de la Légion d'Honneur qui lui a été décerné en raison de son action pour l'environnement. ll est donc évident que lorsque l'on recherche des solutions on en trouve et que pour les mettre en oeuvre il faut conjuguer volonté politique et adhésion du public. Si le président du SEMOCTOM, qui est chargé du Plan de Gestion des Déchets Ménagers et Assimilés de la Gironde au Conseil Général, pouvait s'inspirer de cet exemple et instaurer une véritable politique de réduction des déchets en Gironde, évitant ainsi la construction de nouveaux incinérateurs, les populations locales -qui ont été très sensibles aux scandales liés aux usines d'incinération de Gilly-sur-Isère, Fumel, Lunel, Maincy, etc - lui en seraient extrêmement reconnaissantes.
Il
est encourageant de constater que des syndicats voisins
se sont engagés sur la bonne voie : Qu'on se le dise et qu'on y réfléchisse. Cela en vaut vraiment la peine !
P.S.
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